mardi 2 novembre 2021

Toute la laideur humaine…


Taille originale : 21 x 29,7
« Le type d’enchevêtrement que j’ai à l’esprit devient manifeste lorsque nous analysons des mots comme “cruel”. Le mot “cruel” a manifestement un usage normatif - en tout cas pour la plupart des gens, même si certains défenseurs célèbres de la dichotomie fait/valeur le nient - et en effet éthique. Si l’on me demande de dire quel genre de personne est l’instituteur de mon fils, et que je dise “il est très cruel”, j’en fais la critique à la fois comme instituteur et comme homme. Je n’ai pas besoin d’ajouter : “il n’est pas un bon instituteur” ou “il n’est pas un homme bon”. Je pourrais certes dire : “quand il ne fait pas preuve de cruauté, c’est un très bon enseignant”. Mais, si je n’ai pas déterminé sous quels rapports et en quelles occasions il est un bon enseignant, ni sous quels rapports et en quelles occasions il est très cruel, je ne peux simplement pas dire “c’est une personne très cruelle et un très bon enseignant”. De même, je ne peux pas dire, en espérant être compris “c’est une personne très cruelle et un homme bon”. Pourtant, “cruel” peut aussi avoir un usage purement descriptif, comme lorsqu’un historien écrit qu’un certain monarque était exceptionnellement cruel et que la cruauté du régime a provoqué un certain nombre de révoltes. “Cruel” ignore simplement la prétendue dichotomie fait/valeur et se permet allègrement d’être utilisé parfois dans un dessein normatif, parfois comme un terme descriptif. (En effet, ceci est également vrai du terme “crime”.) Dans la littérature, il est souvent fait référence à de tels concepts comme à des “concepts éthiques épais”. On a depuis longtemps attiré l’attention sur le fait que les concepts éthiques épais sont des contre-exemples à l’idée qu’il existe une dichotomie absolue entre les faits et les valeurs, mais les défenseurs de la dichotomie ont proposé trois réponses principales. »

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