dimanche 26 novembre 2017

L’Iliade et l’Odyssée




Je ne pense que ce soit un archétype ou un modèle qui aurait imprégné on ne sait pas trop comment toute la culture européenne. La seule chose que cela signifie, c’est qu’il s’agit d’une espèce d’heureux hasard artistique : Homère, c’est la première œuvre littéraire occidentale et l’on peut encore lire aujourd’hui l’Iliade et l’Odyssée et y trouver un sens immédiat ou simplement s’y retrouver, y retrouver une part de soi-même. Ce qui s’y illustre, c’est le flux et le reflux. C’est ce double mouvement qui est significatif.
Achille est animé par la colère. C’est ce qui le pousse quand l’aventure n’aboutit pas, quand les Achéens ne parviennent pas à gagner la guerre. Mais partir de chez soi ou sortir de soi, le mouvement est le même. Ce n’est pas la violence qui est première, ce n’est pas l’agressivité, ni la séduction de la guerre dont parlent certains reporters, mais c’est la sortie de soi, qui implique une perte de soi, une ouverture, une échappée. Et un risque : on doit s’oublier, oublier de se préserver, oublier de préserver sa propre image, on doit risquer d’abîmer sa propre image, et ce risque est celui de sa propre mort. Celle de Patrocle, celle d’Achille finalement.
Lacan en parle de sa façon obscure et prétentieuse, mais c’est de cela qu’il s’agit avec l’objet du désir, l’objet (a) exposant dit-il d’une fonction, celle de l’index levé vers une absence : le vocabulaire algébrique me laisse coi mais la formule qui suit est plutôt jolie. Une absence que n’importe quoi vient remplir, la guerre, l’aventure, l’art, le pouvoir, n’importe quoi qui semble réel, qui est réel, mais qui bientôt se révèle illusoire du fait de l’insatisfaction fondamentale du désir… C’est ça l’Iliade, partir à la conquête de l’objet absent de son désir. Ça a l’air très masculin dit comme ça, mais, plus l’égalité progresse, plus les femmes, écrivaines, cinéastes, artistes, nous raconteront la même histoire, le même leurre, le même tremblement que l’on éprouve dans cette sortie de soi, la même excitation que l’on éprouve à se mettre en danger, quelle qu’en soit la forme (ah ! les sports extrêmes ! succédané des aventures anciennes).
La guerre ne m’intéresse pas. Peut-être parce que c’est trop risqué et que c’est de la lâcheté de ma part. Et puis la guerre est injuste, toujours. Mais la sexualité, oui, c’est une sortie de soi, une exposition à l’autre, ce tremblement quand on se donne, quand on se s’abandonne à l’autre. On dit que ce sont les femmes qui se donnent, qui s’abandonnent, mais c’est vrai aussi pour les hommes… On fait l’amour jusqu’à l’abandon, jusqu’à s’abandonner soi-même.
Mais ensuite, il y a le retour vers Ithaque, le retour vers soi. Pas le retour heureux. Un retour lent et difficile vers ce qu’on est, seul. On se retrouve, oui, mais seul. Parce que l’aventure est finie. Ne reste que la mélancolie.

jeudi 16 novembre 2017

du bonheur très concentré…

taille originale : 29,7 x 21 cm

— Mais la madame, ça lui fait mal ?
— Non, non, ça lui fait plaisir…
— Mais lui , il pousse très fort par derrière…
— Non, c’est elle qui décide, c’est elle qui le fait entrer… autrement ce n’est pas agréable…
— Mais elle a l’air tellement sérieuse… elle ne va pas pleurer ?
— Elle est concentrée, elle le fait glisser tout doucement pour qu’il aille lentement au fond… Et puis elle se caresse, tu vois.
— Mais pourquoi ? tu as dit que ça lui fait plaisir par derrière…
— Oui, mais c’est plus agréable quand elle se caresse par devant aussi…
— Tu es sûr qu’elle est d’accord ?
— Je ne dessine pas bien si tu crois ça. Je suis déçu, pas par toi, par mon dessin.
— Mais il est bien ton dessin !
— Non, il faudrait qu’on voie mieux que c’est elle qui a les choses en main si je puis dire.
— Il faudrait qu’elle sourie pour qu’on voie qu’elle est heureuse !
— Ha, ha… tu as raison. Mais le plaisir, c’est comme du bonheur mais très concentré… Elle se concentre, tu vois, sur la sensation, sur la sensation qu’elle est pénétrée, complètement pénétrée. Lui aussi d’ailleurs.
— Ils sont tous les deux heureux alors ?
— Oui, on peut dire ça. Tous les deux, Elle et lui. Il faudrait même qu’en voyant le dessin, on devine que c’est elle qui l’a demandé, c’est elle qui en avait envie…
— Tu m’expliqueras encore ?

lundi 6 novembre 2017

Mais tu as oublié le monsieur…


— Oui, c'est vrai…   Attends, je vais le refaire…
— Il est fâché le monsieur ?
 — Non, non, il est, comment dire, concentré… mais il n'est pas fâché. Je crois qu'il est content d'être là, avec la madame. Et elle aussi d'ailleurs.
— Tu es sûr ?
— Oui, autrement, je ne les aurais pas dessinés ensemble. Je ne dessine que des gens qui s'entendent bien.