dimanche 24 décembre 2023

Une loi brutale et sale

Climat social
« Elle est incapable de lever les yeux sur lui, dans un affolement délicieux. Elle n’en revient pas de ce qui lui arrive. Il chuchote, on sort ? Elle dit oui, ils ne peuvent pas flirter devant les autres. Ils sont dehors, longent les murs de l’aérium enlacés. Il fait froid. Près du réfectoire, devant le parc obscur, il la plaque contre le mur, il se frotte contre elle, elle sent son sexe contre son ventre au travers du jean. Il va trop vite, elle n’est pas prête pour tant de rapidité, de fougue. Elle ne ressent rien. Elle est subjuguée par ce désir qu’il a d’elle, un désir d’homme sans retenue, sauvage, sans rapport avec celui de son flirt lent et précautionneux du printemps. Elle ne demande pas où ils vont. À quel moment a-t-elle compris qu’il l’emmenait dans une chambre, peut-être l’a-t-il dit ?
Ils sont dans sa chambre à elle, dans le noir. Elle ne voit pas ce qu’il fait. À cette minute, elle croit toujours qu’ils vont continuer de s’embrasser et de se caresser au travers des vêtements sur le lit. Il dit “Déshabille-toi”.
Depuis qu’il l’a invitée à danser, elle a fait tout ce qu’il lui a demandé. Entre ce qui lui arrive et ce qu’elle fait, il n’y a pas de différence. Elle se couche à côté de lui sur le lit étroit, nue. Elle n’a pas le temps de s’habituer à sa nudité entière, son corps d’homme nu, elle sent aussitôt l’énormité et la rigidité du membre qu’il pousse entre ses cuisses. Il force. Elle a mal. Elle dit qu’elle est vierge, comme une défense ou une explication. Elle crie. Il la houspille : “J’aimerais mieux que tu jouisses plutôt que tu gueules !” Elle voudrait être ailleurs mais elle ne part pas. Elle a froid. Elle pourrait se lever, rallumer, lui dire de se s’habiller et de s’en aller. Ou elle, se rhabiller, le planter là et retourner à la sur-pat. Elle aurait pu. Je sais que l’idée ne lui en est pas venue. C’est comme s’il était trop tard pour revenir en arrière, que les choses doivent suivre leur cours. Qu’elle n’ait pas le droit d’abandonner cet homme dans cet état qu’elle déclenche en lui. Avec ce désir furieux qu’il a d’elle. Elle ne peut pas imaginer qu’il ne l’ait pas choisie — élue — entre toutes les autres.
La suite se déroule comme un film X où la partenaire de l’homme est à contretemps, ne sait pas quoi faire parce qu’elle ne connaît pas la suite. Lui seul en est le maître.
Il a toujours un temps d’avance. Il la fait glisser au bas de son ventre, la bouche sur sa queue. Elle reçoit aussitôt la déflagration d’un flot gras de sperme qui l’éclabousse jusque dans les narines. Il n’y a pas plus de cinq minutes qu’ils sont entrés dans la chambre. »
Loin de la foule déchaînée ?
« Ils se rhabillent. Elle le suit dans sa chambre à lui, qu’il occupe seul en tant que moniteur-chef. Elle a abdiqué toute volonté, elle est entièrement dans la sienne.
Dans son expérience d’homme. (À aucun moment elle ne sera dans sa pensée à lui. Encore aujourd’hui celle-ci est pour moi une énigme.)
Je ne sais pas à quel moment elle, non pas se résigne, mais consent à perdre sa virginité. Veut la perdre. Elle collabore. Je ne me rappelle pas le nombre de fois où il a essayé de la pénétrer et qu’elle l’a sucé parce qu’il n’y arrivait pas. Il a admis, pour l’excuser, elle : “Je suis large.”
Il répète qu’il voudrait qu’elle jouisse. Elle ne peut pas, il lui manie le sexe trop fort. Elle pourrait peut-être s’il lui caressait le sexe avec la bouche. Elle ne le lui demande pas, c’est une chose honteuse à demander pour une fille. Elle ne fait que ce dont il a envie.
Ce n’est pas à lui qu’elle se soumet, c’est à une loi indiscutable, universelle, celle d’une sauvagerie masculine qu’un jour ou l’autre il lui aurait bien fallu subir. Que cette loi soit brutale et sale, c’est ainsi.
Il dit des mots qu’elle n’a jamais entendus, qui la font passer du monde des adolescentes rieuses sous cape d’obscénités chuchotées à celui des hommes, qui lui signifient son entrée dans le sexuel pur :
Je me suis masturbé cet après-midi.
Toutes des gouines dans la boîte où tu es, non ? »
La touffe de Marie Madeleine
« Protocole de nettoyage renforcé »
Taille originale : 29,7 x 42 cm & 29,7 x 21 cm

samedi 16 décembre 2023

Le mâle prouve ses capacités…

Les dilemmes de l’art contemporain
« Si les liens affectifs sont à l’origine du comportement d’assistance, ce sont sans doute les soins parentaux qui en sont la source ultime d’un point de vue évolutif. Comme l’a expliqué Irenäus Eibl-Eibesfeldt, les soins parentaux sont apparus de façon évolutive chez les oiseaux et les mammifères et ont d’abord consisté à nourrir les jeunes, à leur tenir chaud, à les nettoyer, à apaiser leur détresse, et à les toiletter. En retour, se sont développés les cris d’appel des nouveau-nés, destinés à provoquer les soins parentaux. À partir du moment où ces échanges affectueux entre parents et progéniture furent établis, ils ont été étendus à d’autres relations, y compris celles entre adultes non apparentés. C’est ainsi que, chez les oiseaux, la femelle demande la nourriture à son partenaire en observant la même attitude que les oisillons affamés — bec grand ouvert et battements d’ailes —, tandis que le mâle prouve ses capacités de fournir des soins en lui donnant une bonne becquée.
Peux-tu repérer le trou de son cul ?
ou
Quel est l'objet de son adoration ?
Bien sûr, les attitudes caractéristiques des soins parentaux s’expriment aussi chez les êtres humains. Par exemple, les amoureux se donnent des petits noms (tels que “bébé”), et les adultes prennent une voix aiguë pour s’adresser autant à de très jeunes enfants qu’à des partenaires intimes. Dans le même ordre d’idée, Eibl-Eibesfeldt suggère que le baiser dérive probablement du bouche-à-bouche utilisé par les parents pour donner des aliments mastiqués à leurs petits. Le baiser, sans transfert de nourriture, est le moyen presque universellement employé par les êtres humains pour exprimer l’amour et l’affection. Or, d’après Eibl-Eibesfeldt, pour s’embrasser, “l’un des partenaires joue le rôle de celui qui reçoit, en ouvrant la bouche à la façon d’un bébé, tandis que l’autre exécute des mouvements de langue, comme s’il poussait de la nourriture”. Il est intéressant de remarquer que les chimpanzés nourrissent leurs petits au bouche-à-bouche et pratiquent aussi le baiser entre adultes. Un proche parent du chimpanzé, le bonobo, pratique même des baisers avec la langue. On n’a sans doute pas encore déterminé tous les maillons de la chaîne menant du nourrissage parental à l’attachement et au comportement d’assistance ; cependant on peut difficilement contester son existence. »
Taille originale : 29,7 x 21 cm et 21 x 29,7 cm

lundi 11 décembre 2023

Autre plaisir Ne sceüsse en ce monde choisir

Encore un !?
taille originale : 2 fois 29,7 x 21 cm
Et ainsi me fut bel
Par une espace
De temps ainçois qu’eusse pensee lasse.
Mais vraie amour qui les amans enlace
Souffrir ne volt plus que me deportasse
D'ardant desir
D'elle estre amé. Cellui me vint saisir
Parmy le cuer tellement que plaisir
Ne poz avoir oncques puiz, ne choisir
Autre soulaz
Qu’elle veoir, dont oncques ne fu las.
Mais ce veoir plus [estraignoit] le las
De mon desir, dont souvent dire « Helas ! »,
En regraittant,
Me couvenoit, desirant s'amour tant
Que n’estoye nulle part arrestant
Qu’ou service de ma dame.
Je fus heureux,
Avant que l’angoisse ne me surprenne.
Mais l’amour pur qui étreint les amants
Ne permit plus que j’échappe encore au
Désir ardent
Qu'elle m’aime. Le désir m’en saisit
Au creux du cœur tellement que depuis
Je n’ai plus pu me réjouir ni connaître
D’autre plaisir
Que de la voir, sans jamais m’en lasser.
Mais donc la voir resserrait le lacet
De mon désir, et souvent j'en venais
À dire « hélas ! »,
Me lamentant, désirant son amour
Tellement que mon unique obsession
Était de la servir.
Un nouvel âge ?
Ainsi souvent m’esbatoye et jouoye
D'umble maniere
Avec celle que tant aim et tien chiere,
À toute heure, liement, senz enchiere.
Et elle aussi me faisoit bonne chiere
Et me mandoit
Souventeffois et son vueil commandoit.
Si faisoye, comme amant faire doit,
Tout son command. Assez bien m’en rendoit,
Ce m’yere advis,
Le guerredon : quant de son tresdoulz vis
Avoye un ris, tous estoie assouvis,
Ou un plaisant regart quant vis à vis
À long loisir
La pouoye veoir. Autre plaisir
Ne sceüsse en ce monde choisir.
Donc souvent je m’amusais et riais,
Très poliment,
Avec celle qui compte tant pour moi,
À toute heure, joyeusement, sans plus.
Et elle aussi m’accueillait plaisamment.
Et bien souvent
Elle me communiquait ses requêtes.
Et je faisais, comme un bon amoureux,
Tout son plaisir. Elle me payait bien,
Je le croyais,
Pour mes efforts : quand son très doux visage
M’adressait un sourire ou un regard
Aimable, quand je pouvais face à face
La voir longtemps,
J’étais au paradis ! Aucun plaisir
Ne me semblait supérieur en ce monde.

samedi 9 décembre 2023

La divine Aphrodite

Qui tu touches, aussitôt délire
« Il est bien des merveilles en ce monde, il n’en est pas de plus grande que l’homme.
Il est l’être qui sait traverser la mer grise, à l’heure оù soufflent le vent du Sud et ses orages, et qui va son chemin au milieu des abîmes que lui ouvrent les flots soulevés. Il est l’être qui tourmente la déesse auguste entre toutes, la Terre, la Terre éternelle et infatigable, avec ses charrues qui vont chaque année la sillonnant sans répit, celui qui la fait labourer par les produits de ses cavales.
Les oiseaux étourdis, il les enserre et il les prend, tout comme le gibier des champs et les poissons peuplant les mers, dans les mailles de ses filets, l’homme à l’esprit ingénieux. Par ses engins il se rend maître de l’animal sauvage qui va courant les monts, et, le moment venu, il mettra sous le joug et le cheval à l’épaisse crinière et l’infatigable taureau des montagnes.
Parole, pensée vite comme le vent, aspirations d’où naissent les cités, tout cela, il se l’est enseigné à lui-même, aussi bien qu’il a su, en se faisant un gîte, se dérober aux traits du gel ou de la pluie, cruels à ceux qui n’ont d’autre toit que le ciel.
Bien armé contre tout, il ne se voit désarmé contre rien de ce que lui peut offrir l’avenir. Contre la mort seule, il n’aura jamais de charme permettant de lui échapper, bien qu’il ait déjà su contre les maladies les plus opiniâtres imaginer plus d’un remède.
Mais, ainsi maître d’un savoir dont les ingénieuses ressources dépassent toute espérance, il peut prendre ensuite la route du mal tout comme du bien.
Qu’il fasse donc dans ce savoir une part aux lois de sa ville et à la justice des dieux, à laquelle il a juré foi !
Il montera alors très haut dans sa cité, tandis qu’il s’exclut de cette cité le jour où il laisse le crime le contaminer par bravade.
Ah ! qu’il n’ait plus de part alors à mon foyer ni parmi mes amis, si c’est là comme il se comporte ! »
Par quoi le retient-elle ?
Taille originale : 3 fois 29,7 x 21 cm
« Amour, invincible Amour, tu es tout ensemble celui qui s’abat sur nos bêtes et celui qui veille, toujours à l’affût, sur le frais visage de nos jeunes filles.
Tu vogues au-dessus des flots, aussi bien que par les campagnes où gîtent les bêtes sauvages.
Et, parmi les dieux eux-mêmes ou les hommes éphémères, pas un être ne se montre capable de t’échapper. Qui tu touches aussitôt délire.
Tu entraînes les bons sur les routes du mal, pour leur ruine.

Qui triomphe donc ici ? Clairement, c’est le Désir, le Désir né des regards de la vierge promise au lit de son époux, le Désir, dont la place est aux côtés des grandes lois, pami les maîtres de ce monde. La divine Aphrodite, invincible, se joue de tous. »
Traduction au choix :
Ah fi, quelle bassesse ! Se mettre aux ordres d’une femme !
Créature dégoûtante, aux ordres d'une femme.
Ô cœur impie et dompté par une femme !
Traduction au choix :
Je suis de ceux qui aiment, non qui haïssent
Je suis née non pour une haine mutuelle, mais pour un mutuel amour.
Je ne suis pas faite pour haïr, mais pour aimer.