samedi 24 mars 2012

Une reconnaissance intime

taille originale : 27 x 36 cm
« Son art trahit l’apparition d’une sorte de sensualisme cérébral qu’on voit apparaître à la même heure chez tous ses contemporains. On oublie peu à peu la charpente profonde pour caresser par le désir la surface des formes, comme la surface des visages par l’intention psychologique. Quand la statue reste vêtue, les robes se font plus légères qu’une brise sur l’eau. Mais, pour la première fois, la statuaire grecque dévoile tout à fait la femme, dont la forme est surtout significative par les frémissements de sa surface comme la forme masculine qui lui avait dicté sa science l’est avant tout par la logique et la rigueur de sa structure. Pour la première fois, il rejette les étoffes, il exprime sans voiles l’ascension mouvante des torses, l’animation des plans que la lumière et l’air modèlent en frissons puissants, la jeunesse des poitrines, la vigueur des ventres musculeux, le jet pur des bras et des jambes. Il parle du corps de la femme comme on n’en avait jamais parlé, il le dresse et l’adore dans sa rayonnante tiédeur, ses ondulations fermes, dans sa splendeur de colonne vivante où la sève du monde circule avec le sang. Et si nous avons pour Praxitèle une reconnaissance intime, un sentiment attendri, c’est qu’il nous a appris que le corps féminin, par sa montée dans la lumière et la fragilité émotionnante du ventre, des flancs, des seins où sommeille notre avenir, résume l’effort humain dans son invincible idéalisme exposé à tant d’orages. Il est impossible de voir certaines de ces statues brisées, où le torse jeune et les longues cuisses survivent seules, sans être déchiré d’une tendresse sainte. »

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