Hier et aujourd’hui |
« Elle se laissait aller souvent, elle oubliait le langage de Nous Deux, Brigitte, sa surface de petite fille comme il faut fichait le camp. Ensemble, on parlait de “ça”. Et de “ça”, les filles, je le savais, ne doivent pas parler. Intarissable, informée, Brigitte, avec ses propos rigolards et crus me libérait tous les dimanches. Avec elle, le monde était un sexe immense, une formidable envie, un écoulement de sang et de sperme. Elle savait tout, que des hommes vont avec des hommes et des femmes avec des femmes, comment il fallait faire pour ne pas avoir de môme. Incrédule, je fourrage dans la table de nuit. Rien. De dessous le matelas je tire une serviette froissée, empesée de taches par endroits. Objet terrible. Un vrai sacrilège. Quel mot a-t-elle employé, celui des hommes, le jus, la jute, on ne connaissait pas, le savant peut-être, qu’elle avait lu quelque part, sperme, qu’est-ce que l’écrire à côté de l’entendre résonner dans la chambre de mes parents à treize ans. On se racontait des histoires à horrifier les adultes, n’importe quel objet devenait obscène. Jambes en l’air, sexes ouverts ou dressés, banalité des revues pornos, on faisait mieux en paroles et plus gai. Pas de discrimination, le masculin et le féminin se partageaient nos conversations techniques ou blagueuses. Impossible avec Brigitte de sombrer dans la honte le jour où la première secousse m’a saisie sous les draps, elle rit, moi aussi ça m’arrive, mais ne va pas le raconter au curé, ça ne le regarde pas. »
Un voile pudique… |
Déambulation matinale… Taille originale : deux fois 29,7 x 21 cm |
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