Connaître et reconnaître Taille originale : 21 x 28,2 cm |
« L’absence de belles nudités dans les œuvres d’art du XVIIe siècle, qui a pu étonner les historiens, s’explique d’abord par cette austérité imposée par le nouveau climat religieux. Mais une autre raison a dû intervenir. Après une longue période durant laquelle l’effort des artistes s’est orienté vers une définition des règles de la beauté, alors que la belle chair, au moins dans les tableaux mythologiques, continuait à retenir l’attention gourmande des peintres et du public, une tentation inverse a commencé à se faire jour : celle qui substituait à la glorification de l’homme ou de la femme jeunes, à un érotisme aimable et de bonne compagnie, la suggestion brutale de la matérialité du corps, fait d’humeurs et de graisses, sécrétant odeurs et suintements, et aux fonctions organiques inavouables. Que cette tentation ait peu de rapports avec une motivation religieuse, mais qu’elle révèle un versant de la sensualité exprimée en peinture, paraît une évidence. En Italie, en Angleterre, en France, se manifeste chez les écrivains de la même époque — les XVIe et XVIIe siècles — une réaction identique contre les excès d’une littérature qui fait de la femme une déesse intouchable, qu’il s’agisse de concettismo, de gongorismo, d’euphuisme, de bembisme enfin. L’Irlandais Jonathan Swift résumera plus tard par une formule hardie l’exaspération suscitée par cette idéalisation du corps féminin, à propos de l’Anglaise Elizabeth Ière, la reine vierge, baptisée Cynthia — la Dame de la Mer — par les poètes du temps : “Yes, but Cinthya pisses and Cynthia shits”… Les artistes se livrent au même processus de désacralisation, quand ils remplacent la nudité parée d’artifices par un “nu” véritable, c’est-à-dire un corps non seulement déshabillé, mais livré aux regards tel qu’il est, capable, en bref, d’inspirer la gêne, le malaise et, avec eux, le trouble. »
Une interaction réussie ? |
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