Poussières d’étoiles Taille originale : 4 fois 21 x 29,7 cm |
« Il se retourna pour la regarder. Elle vit ses yeux, intenses, brillants, sauvages, sans tendresse. Mais elle avait perdu toute liberté. Un poids étrange pesait sur ses membres. Elle cédait, elle s’abandonnait.
Il la conduisit, à travers le mur d’arbres piquants, malaisés à traverser, jusqu’à un endroit où il y avait un peu d’espace et un tas de buissons morts. Il en coucha un ou deux par terre, mit sa veste par-dessus et l’obligea à s’étendre là, sous les buissons, comme une bête, tandis qu’il attendait, en chemise et en culotte, la regardant d’un regard hanté. Mais, toujours prévoyant, il la fit s’étendre commodément, avec soin. Pourtant il brisa la ceinture de ses dessous, car elle ne l’aidait pas, demeurait inerte.
Lui aussi avait dénudé le devant de son corps, et elle sentit le contact de sa peau nue quand il entra en elle. Pendant un moment il demeura immobile en elle, turgide et palpitant. Alors, comme il commençait à bouger dans l’orgasme soudain où elle s’abandonnait, de nouveaux frissons s’éveillèrent en elle, qui couraient en elle en frémissant. En frémissant, frémissant, frémissant, comme le battement léger de douces flammes, douces comme des plumes, s’élevant parfois à des points éclatants, fines, subtiles, et qui la fondaient et la laissaient toute fondante au-dedans.
Mise à jour |
C’était comme un son de cloche montant de vague en vague jusqu’à un point suprême. Elle restait là, inconsciente des petits cris sauvages qu’elle poussait, qu’elle poussa jusqu’à la fin. Mais la fin vint trop vite ; et elle ne pouvait plus, par ses propres forces, s’obliger elle-même à conclure. Cette fois, c’était différent, différent. Elle ne pouvait rien faire. Elle ne pouvait plus se durcir et s’accrocher à lui pour obtenir sa propre jouissance. Elle ne pouvait qu’attendre, attendre et gémir en pensée, tandis qu’elle le sentait se retirer, s’éloigner, se contracter, tout près du moment terrible où il glisserait hors d’elle pour toujours. Et son corps restait doucement ouvert, se plaignant doucement, comme une anémone de mer sous le flux, le rappelant, lui demandant de revenir en elle et de la satisfaire. Elle s’attachait à lui, perdue dans une passion inconsciente, et il ne glissa pas tout à fait hors d’elle, et elle sentit le mâle bourgeon de chair frémir doucement en elle, et d’étranges rythmes monter en un étrange mouvement rythmique, s’étendre et se gonfler jusqu’à remplir tout le vide béant de sa conscience et alors recommença l’ineffable mouvement qui n’était pas vraiment un mouvement, mais de purs, de profonds tourbillons de sensations, qui tournoyaient et s’enfonçaient toujours plus avant à travers sa chair et sa conscience, jusqu’à ce qu’elle ne fût plus qu’un flot concentrique de sensations, étendue là, poussant des cris inarticulés et inconscients. Cette voix sortie des plus profondes ténèbres de la nuit : la vie ! L’homme l’entendit sous lui avec une sorte de terreur. Tandis que sa semence jaillissait en elle. Et, comme la voix s’apaisait, lui aussi s’apaisa et demeura étendu, parfaitement immobile, sans rien savoir, tandis qu’elle relâchait aussi son emprise sur lui et gisait inerte. Et ils restaient là, et ne savaient plus rien, même rien l’un de l’autre, perdus tous les deux. Jusqu’à ce qu’enfin il se ranimât et s’aperçût de sa nudité sans défense, et qu’elle aussi sentit qu’il relâchait son étreinte. Il s’écartait ; mais, dans son cœur, elle sentait qu’elle ne pourrait supporter qu’il la laissât découverte. Il devrait désormais la couvrir pour toujours.
Mais il s’éloigna d’elle enfin, l’embrassa, la recouvrit et commença à se recouvrir lui-même. Elle restait étendue, regardant l’arbre, incapable de bouger. Il était debout fixant sa culotte, regardant autour de lui. Tout était silencieux et mort excepté la chienne effrayée qui restait étendue le nez entre les pattes. Il se rassit sur les broussailles et prit en silence la main de Constance.
Moriēmur inultae, sed moriāmur |
— Nous avons joui ensemble cette fois, dit-il.
Elle ne répondit pas.
— C’est bon, quand c’est comme ça. La plupart des gens passent toute leur vie sans le savoir, dit-il en parlant un peu comme dans un rêve.
Elle regarda son visage rêveur.
— Vraiment, dit-elle. Êtes-vous heureux ?
Il tourna les yeux vers elle.
— Heureux, dit-il, oui. Mais tais-toi.
Il ne voulait pas parler. Il se pencha sur elle et l’embrassa ; et elle sentait qu’il devait l’embrasser ainsi pour toujours.
Elle se leva enfin.
— Est-ce rare qu’on jouisse ensemble ? demanda-t-elle avec une curiosité naïve.
— Assez rare. Ça se voit à l’air dur et sec des gens. » (1928)
Exposition ? |
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