« L’agapè, définie par le don, n’attend pas de retour, ni sous la forme d’objets, ni même sous l’espèce immatérielle d’amour en retour. Le don de l’agapè ignore le contre-don. Pour la personne en état d’agapè, ce qui est reçu ne peut être mis en rapport avec ce qu’elle a elle-même donné, à un moment précédent du temps.
taille originale : 29,7 x 21 cm |
Mais, ignorant l’équivalence, l’agapè ignore aussi, par là-même, le calcul. Elle ne se donne pas munie d’un espace temporel de calcul et c’est la raison pour laquelle on dit souvent qu’elle est sans limites. Cette inaptitude au calcul qui, avec la faiblesse des anticipations, inhibe l’attente d’un retour, supprime aussi la dette. La personne en état d’agapè, ne retient pas plus qu’elle n’attend. Elle ne se souvient ni des offenses subies ni des bienfaits qu’elle a accomplis, et c’est à juste titre que la faculté de pardonner est, avec la faculté de donner gratuitement, la propriété la plus souvent associée à l’agapè.
L’amour en agapè est à l’abri de l’épreuve et à l’écart de la jalousie. Et ce que la loi d’amour prescrit en premier lieu, c’est l’impossibilité de juger, et par là, la vacuité de prescrire. Saint Paul, pour marquer son opposition au juridisme, l’exprime d’un mot : “tout est permis”. Pour être gardé vivant, l’amour doit être maintenu dans l’incommensurable qui est son élément. Dans l’incommensurable, la réciprocité est infinie de part et d’autre. Celui qui aime ne peut pas calculer : aucune limite n’est fixée à l’amour ; pour que le devoir soit accompli, il faut que l’amour soit illimité, c’est-à-dire demeure immuable, quel que soit le changement survenu dans son objet. Lorsque l’amour est agapè, le fait de savoir su l’on persistera ou non à aimer ne dépend pas de la volonté d’aimer l’autre. »
taille originale : 24,5 x 30,5 cm |
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